C’est vrai, les magasins de vêtements proposent des habits de plus en plus sexués. Tout comme les magasins de jouets. Si les jouets ou vêtements sont devenus de plus en plus sexués au fil du temps, c’est qu’ils ont suivi les avancées technologiques (modes de production en série) et surtout qu’ils répondent à une stratégie marketing. Sexuer un objet permet de le vendre deux fois plus, surtout dans le domaine de la petite enfance. Les habits que vous aurez achetés pour votre fille ne pourront pas être portés par son petit frère.

Pas étonnant alors que les rayons des magasins de jouets et vêtements soient organisés de façon analogue: on trouve le rayon bébé, pour les 0-2 ans, puis les vêtements pour filles et garçons, signalés le plus souvent par des pancartes roses et bleues, tout comme il y a des jouets d’éveil soi-disant unisexes avant la scission visible en terme spatial entre jouets féminins et jouets masculins.

Dans le rayon pour bébés, les vêtements sont devenus sexués de plus en plus tôt. Souvent, c’est la couleur qui marque le sexe (comme pour les tapis d’éveil dans les magasins de jouets), ou la forme du col, plus arrondi pour les filles que pour les garçons. Mais même les petits bodies blancs finissent par renvoyer à un sexe déterminé, parce qu’on y trouve un camion imprimé ou une fleur brodée.

Comme pour les jouets, les vêtements pour garçons favorisent davantage l’autonomie. À l’instar des jeux où le petit garçon joue seul et dont l’objectif est de terminer le jeu (puzzle, jeux de construction, etc.), les vêtements pour garçons émancipent. Il est en effet plus aisé de se mouvoir, de marcher à quatre pattes en salopette que dans une robe à volants. Et il est plus facile pour les garçons de s’habiller seuls: les boutons pression, les pantalons à élastique ou les scratchs sont plus simples à manier que les boutons, les boutonnières dans le dos de la robe ou les lacets.

Et dans le monde du jouet comme dans celui du vêtement, le garçon est beaucoup plus découragé que la fille à s’investir dans ce qui est étiqueté du sexe opposé. Autant une petite fille pourra facilement porter les jeans et les baskets de son grand frère, tout comme elle pourra aussi réclamer un train électrique pour Noël, autant le garçon qui veut aller à l’école en T-shirt rose ou qui souhaite un poupon pour son anniversaire sera regardé de travers par ses parents.

Or, tout comme pour les magasins de jouets, ces différences ne sont pas superficielles: elles vont consacrer les stéréotypes de genre. La seule différence entre magasins de jouets et de vêtements est que le vestiaire des filles est plus étendu que celui des garçons, en termes de couleurs et de types de vêtements, tandis que c’est l’éventail de jouets du rayon garçons qui est plus vaste. Mais cette divergence même scelle les clichés sexistes: le paraître est attaché au sexe féminin, l’être et l’activité au sexe masculin.