Les enseignes commerciales du monde du jouet proposent aux enfants un univers dans lequel la mixité n’existe pas. Les magasins de jouets sont scindés en rayons pour filles d’un côté et rayons pour garçons de l’autre. Dans les catalogues de jouets, l’univers des pages roses ne se mélange pas avec celui des pages bleues. Et les dépliants, jusque dans les pages «neutres» proposant à la vente des jeux d’extérieur, de société ou d’activité créatrice, mettent en scène les filles et les garçons de manière différente suivant leur sexe.

La différence est encore plus flagrante si on y regarde de près. Les jouets vendus aux garçons sont plus nombreux (dans les magasins, plus de mètres carrés leur sont dévolus et, dans les catalogues, il y a plus de pages garçons que de pages filles) et plus diversifiés. Ils renvoient dans leur majorité à la sphère professionnelle et aussi à des compétences techniques en lien avec:

  • Les moyens de transport train, bateau, avion, hélicoptère, fusée, voiture qu’ils peuvent conduire ou réparer avec un petit garage et des outils appropriés.
  • La construction engins de chantiers, grues, établi, mallette de bricolage, Meccano.
  • La sécurité déguisements de policier et de militaire, caserne de pompier, répliques d’armes en plastique, mallette du petit détective.
  • La science et la technique la boîte du petit chimiste, microscope, télescope, jeux électroniques.

En revanche, les jouets vendus dans les rayons filles sont plus limités et rappellent la sphère privée en s’orientant exclusivement sur le domaine maternant/parental ou domestique. Les filles peuvent:

  • Prendre soin de bébé avec le poupon et tout ce qu’il faut pour s’en occuper (berceau, poussette, langes, chauffe-biberon, etc.).
  • Faire les courses et faire à manger avec la cuisinière, la dînette, le panier de course, les fruits et légumes en plastique, la boîte en carton représentant une brique de lait ou un paquet de spaghettis.
  • Nettoyer avec l’aspirateur, le chariot de ménage, la machine à laver, le fer et la planche à repasser, etc.

Les jouets pour fille qui font écho à la sphère professionnelle existent, mais ils sont moins nombreux et font souvent référence à des professions moins valorisées sur l’échiquier social et moins rémunérées. On y trouve le domaine du nettoyage, de l’éducation (le poupon pour la puériculture, ou le tableau noir pour l’enseignement), des soins esthétiques (tête à coiffer et à maquiller, créations de bijoux) et de la vente (caisse enregistreuse).

Peut-être pour atténuer l’aspect restreint et déprécié du futur évoqué côté filles, les jeux qui leur sont vendus se situent aussi dans le monde du rêve: des robes de princesse au micro pour devenir une star, ce qui est proposé aux petites filles ne ressemble pas vraiment à une éventuelle profession future. Bien sûr, les garçons ont eux aussi leurs chevaliers et super-héros, mais Spiderman, Batman et Cie évoquent une notion d’action, si ce n’est de violence, tandis que les princesses et chanteuses sont mises en scène dans un univers féérique et passif. Les héroïnes et petites filles aventureuses et autonomes comme Fifi Brindacier, Fantômette, Caroline et ses amis ou encore la jeune Mulan de Disney sont loin d’être légion.